Pleurer des rivières
Je remercie les Editions d'Héloïse d'Ormesson pour l'envoi de cette lecture.
Alain Jaspard
Alain Jaspard est un réalisateur né en 1940. Il a signé plusieurs adaptations de livres jeunesse en séries animées pour la télévision, notamment Tom-Tom et Nana de Jacqueline Cohen et Bernadette Després, Le Proverbe de Marcel Aymé, ainsi que Les Contes de la rue Broca de Pierre Gripari. Pleurer des rivières est son premier roman.
Franck le savait, il n'aurait pas dû se laisser attendrir quand Sammy, fauché comme les blés, lui a parlé de son plan infaillible – sur le banc des accusés le constat est amer. Heureusement, Julien, leur avocat commis d'office, connaît ses dossiers et obtient facilement sa relaxe. Franck est un type bien, marié à Mériem et père de sept enfants. D'ailleurs la joyeuse bande vit, ou survit, sur l'aire des gens du voyage d'Argenteuil, où Julien fait leur connaissance.
Choc des cultures pour ce bourgeois parisien confortablement installé avec Séverine, auteur jeunesse à succès qui écrit pour les enfants qu'elle ne parvient pas à avoir. Et si rien ne prédestinait les deux couples à se rencontrer, le ventre fécond de Mériem va sceller un pacte dont ils ne pourront plus revenir...
Ma chronique :
Alain Jaspard nous livre ici un premier roman fort et puissant, une histoire à couper le souffle d’une simplicité étonnante. C’est la rencontre ente deux mondes, entre deux catégories socio - professionnelles. A l’occasion d’une comparution immédiate Julien l’avocat va défendre Franck, un Gitan d’Argenteuil, de leur rencontre va naître un projet fou porté avec entrain par leurs femmes respectives à savoir Séverine auteur d’album pour enfant, qui désespère un jour d’être maman et Mériem, belle gitane féconde qui entame gaiement sa huitième grossesse. On assiste au choc de ces deux mondes, au manque de moyen des uns au surplus des autres.
Ce livre vient toucher la corde sensible avec un style bien personnel qui m’a bien souvent fait sourire. Une belle écriture comme si l’on parlait et une verve qui donne du dynamisme au texte. J’ai beaucoup aimé la construction des quatre personnages que forment les deux couples sans oublier l’ami Sammy qui est à lui tout seul un poème. J’ai applaudit aux métaphores employées, celle sur le ver dans la pomme me restera en mémoire tant elle est appropriée et bien trouvée. C’était un plaisir de lire ce livre qui pourrait tout à fait être transformé en scénario de film tant les images qu’il a fait naître dans ma tête était réelles. Il m’a même fait penser à « J’ai épousé une ombre » dans un autre genre mais avec pas mal de similitudes aussi. Voilà un auteur que je vais suivre en espérant qu’il publiera encore d’autres merveilles. Bonne lecture.
-
Citation :
Une idée, au début, c’est rien du tout, une p’tite graine. Minuscule, enfouie dans le crâne, planquée dans le cortex, oubliée entre deux pensées, qui n’arrive pas à germer. Et puis une jour, va savoir pourquoi, elle se réveille, elle s’étire comme sortant d’un bon sommeil, toute fripée, les yeux pas en face des trous, mais t’inquiète, bien vivace, prête à s’élancer, au petit trot d’abord, mais comme on ne s’en aperçoit pas, vexée, elle appuis sur le champignon, passe au galop et là elle vous paraît évidente, mais bien sur, elle se transforme d’idée banale en bonne idée puis en idée de génie et là, si tu te méfies pas elle t’emmène très loin. L’idée.