Madame S
Je remercie les Editions Slatkine & Compagnie pour cette nouvelle lecture.
Sylvie Lausberg
Sylvie Lausberg est historienne et psychanalyste, diplômée de l'Université Libre de Bruxelles, où elle enseigne actuellement la psychologie. En parallèle, elle poursuit depuis plusieurs années une carrière de journaliste indépendante. Également très impliquée dans la lutte pour l'égalité des sexes, elle est présidente du Conseil des Femmes Francophones de Belgique et membre du Conseil fédéral de l'Égalité des chances entre les Femmes et les Hommes. Madame S. est son premier roman.
L'anecdote est célèbre : alors que le président Félix Faure agonise, sa " connaissance " s'est sauvée par l'escalier de service. Cette mort en épectase va changer le cours de l'affaire Dreyfus et bouleverser le destin de celle que l'on surnomme depuis la " pompe funèbre "...
Intriguée par cette " putain de la République ", une journaliste recluse décide d'enquêter sur cette si mystérieuse Madame S. et sur les secrets d'un État français toujours aux prises avec les mêmes démons : antisémitisme, antiféminisme, petits arrangements entre amis et journaux avides de scandales.
Sylvie Lausberg livre un passionnant thriller historique sur les traces volontairement effacées de Marguerite Japy-Steinheil, personnalité troublante qui sauvera sa tête grâce à un art virtuose du mensonge, un charme dévastateur et une profonde intelligence politique, restés ensevelis sous des torrents d'injures misogynes qui en disent long sur notre rapport au sexe, au pouvoir et aux femmes qui en jouent.
Une biographie sur une femme exceptionnelle, passée quasi inaperçue dans nos livres d’histoires. Il faut dire que la vie de Marguerite Steinheil, dite Meg est passionnante surtout quand on songe que tout cela se passait à la fin du 19ième siècle. J’ai apprécié le point de vue de l’auteur qui se place comme narratrice sur les lieux même où à vécu Meg. Ce n’est donc pas un roman mais bien une biographie qui vise à mettre en lumière une femme avant-gardiste, éprise de liberté, une féministe avant l’heure en quelque sorte. Meg a une enfance choyée surtout par son père qui l’adore. Elle se marie à un peintre bien plus âgé qu’elle, ce qui lui assure une certaine liberté dont elle ne va pas se priver. Elle reste connue pour avoir été la maîtresse du chef d’état Félix Faure, il serait mort dans ses bras dit-on. Elle tenait salon, ce qui en fait au-delà d’une courtisane, une femme ayant côtoyé le « gratin » de la haute société de l’époque. Elle rencontre Bartholdi, Goudot, Toulouse-Lautrec entre autre. Elle était Dreyfusarde, avait l’oreille du Président et une belle sphère d’influence. Sa chute n’en sera que plus rude lorsqu’elle se retrouve mise plus bas que terre après la mort de Félix Faure mais aussi quelques années plus tard après le double assassinat de sa mère et de son mari. Des épreuves qui forgeront une destinée riche en rebondissements et hors des sentiers battus. J’ai beaucoup aimé suivre cette enquête menée par l’auteure avec passion, il y avait de nombreux renvoi plus de 350 qui font référence aux pièces trouvées lors de ses recherches. Elle a fait plusieurs fois la une du Petit journal, merci à la maison d’édition pour ce petit plus. Un portrait de femme attachant à découvrir pour mieux comprendre les dessous de l’Etat et la place des femmes en ce début du 19ième siècle. Bonne lecture.
Citation :
Courtisée par la majorité des hommes qui fréquentent son salon, elle est, à vingt-cinq ans, absolument séduisante. Son seul souci est de trouver celui qui lui apportera ce qu’elle cherche. Mais que veut-elle ? Moins la quête éperdue d’une partie de draps froissés que cet éden autrement inspiré qu’elle a mis toute sa science à édifier. Retrouver le goût du paradis perdu par des rencontres secrètes, des moments émouvants, des mots doux envolés.
Qu’il est amer, le goût de cette lutte que mènent les femmes pour dénoncer un sort commun que le seul sexe détermine. Filles passées de main en main, objets de marchandage, soumises à la loi du marché conclu.
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