Brassens et Tintin : Deux mondes parallèles
Je remercie le site Babélio et sa #massecritique
ainsi que les éditions Les impressions nouvelles pour l'envoi de ce nouveau titre.
Renaud Nattiez
Et pourtant. .. Ces deux créations majeures du XXe siècle séduisent des publics communs. Est-ce seulement dù à l'immense talent de leurs démiurges ou à leur contemporanéité - 1921-1981 pour Brassens, 1907-1983 pour Hergé - qui suffirait à engendrer une connivence générationnelle et culturelle ?
Ce livre démontre qu'une telle explication ne suffit pas : il existe des analogies, voire des affinités entre ces œuvres apparemment si dissemblables. Contrairement à ce que pourrait laisser penser une approche superficielle, les « philosophies de vie » des personnages mis en scène par Georges Brassens et Georges Remi sont loin d'ètre incompatibles.
Grâce à une analyse approfondie des récits du poète sétois et du dessinateur belge, Renaud Nattiez met en évidence des correspondances surprenantes, des similitudes insoupçonnées. Deux mondes parallèles, au double sens du mot : ils ne se confondent pas, ils ne se rejoignent pas, mais ils évoluent dans la mèmc direction comme si, au fil des ans1 Brassens s'était rapproché de Tintin et Tintin de Brassens.
Ma chronique :
Un livre dont le titre est intriguant et attirant quand comme moi on aime Brassens et Tintin.
Grace à Renaud Nattiez, on va pouvoir relier certain personnages des chansons de Brassens avec ceux de la Bande dessinée de Tintin. Cela fait sens alors que je n’avais personnellement jamais imaginé de tels liens. C’est particulièrement frappant avec les personnages de Tonton Nestor et de Séraphin Lampion c’est toutes sortes de caricatures au fort caractère qui apparaissent comme des personnages secondaires certes, mais qui sont essentiels pour donner du relief et de la saveur aux personnages principaux. On retrouve aussi le côté comique dans les œuvres de l’un comme de l’autre, même si bien souvent on rit pour ne pas pleurer chez Brassens. Chaque analogie est abordée avec des extraits de paroles des chansons ou des dialogues et l’on comprend mieux ce qui se joue. Le thème de la mort est très présent dans l’œuvre de Brassens, souvent il défie la Camarde. De son côté Tintin échappe un nombre incalculable de fois à la mort. Bref vous l’aurez compris nous avons entre les mains un livre d’une grande richesse qui porte nos réflexions un pas plus loin. La place de l’amour est quasi inexistante chez Tintin qui restera un éternel célibataire alors que Brassens aborde la chose parfois crûment tout en étant fort misogyne. Heureusement, on retrouve les copains d’abord chez les deux. Il y a Haddock, le professeur Tournesol ou encore le jeune Abdallah et avec Brassens, il n’est besoin que d’écouter sa chanson pour se rendre comprendre à quel point l’amitié masculine a toute son importance. Vous l’aurez compris, un livre pas comme les autres, qui apporte un nouveau regard sur Hergé et Brassens tout en pointant du doigt tout ce qui les rapproche. A découvrir. Bonne lecture.
Citations :
Chez Brassens comComme l'écrit Pol Vandromme : "L'amitié, pour Brassens, c'était, mieux que l'amour, le tutoiement de la tendresse (...). Brassens croyait à l'amitié, parce que l'amitié aidait à vivre, parce qu'elle était l'accord de je et de l'autre. Il ne croyait pas à l'amour, parce que l'amour enchaînait, parce qu'il était la prise de possession du je par l'autre, l'amitié- phalanstère ; l'amour- cachot.Le libertaire n'aimait d'amour que l'amitié."me dans Tintin, les peintures de caractères sont des caricatures, mais des caricatures rarement féroces.
Pas question de nier une différence fondamentale entre le monde de Brassens et celui de Tintin : la place des femmes, rares dans la bande dessinée ; de l'amour et du sexe, clairement absents. Cette ligne de démarcation existe, c'est un fait, Tintin se fout de Cupidon, tandis que Brassens exprime une vision crue de l'amour, dégagée de la morale traditionnelle.