La chasse
Je remercie XO Editions pour l'envoi de cette nouvelle lecture.
Bernard Minier
" Il y a des ténèbres qu'aucun soleil ne peut dissiper. "
Sous le halo de la pleine lune, un cerf surgit de la forêt. L'animal a des yeux humains. Ce n'est pas une bête sauvage qui a été chassée dans les forêts de l'Ariège...
Dans ce thriller implacable au final renversant, Bernard Minier s'empare des dérives de notre époque. Manipulations, violences, règlements de comptes, un roman d'une actualité brûlante sur les sentiers de la peur.
Une enquête où Martin Servaz joue son honneur autant que sa peau.
40 ans, commandant de police judiciaire dans le Sud-Ouest, divorcé, solitaire, un brin misanthrope, père d’une ado rebelle, perfectionniste, habité par un sens de sa mission obsessionnel jusqu’au malsain, est confronté à une société de plus en plus violente et crépusculaire, à ses propres démons et à un mal de plus en plus intimement lié à notre vie quotidienne.
Il est devenu flic pour pouvoir rouvrir le dossier de la mort de sa mère, après la mort de son père, mais il ne voit pas la vie et le monde comme un flic : plutôt comme un poète, un philosophe et un survivant.
Peu à l’aise dans le monde d’aujourd’hui, il aime : les livres, les citations latines, la musique classique (celle de Mahler), sa fille ; n’aime pas : l’incompétence, l’injustice, la bêtise, le sport à la télé, la société de consommation, les nouvelles technologies, les cyniques, les arrivistes, les hypocrites, les pourris, les serviles, les menteurs, les donneurs de leçons, la vitesse, les armes à feu…
Ma chronique :
Nous retrouvons pour la septième fois le commandant Servaz. Il est appelé pour un accident de la route entre une voiture et un homme nu à tête de cerf. Ce jeune homme a tenté d’échapper à quelque chose qui le terrifiait, il porte gravé au fer rouge sur le torse le mot « justice ». Le prologue nous plonge tout de suite dans l’ambiance avec cette scène choquante. L’enquête commence et l’auteur ne se prive pas de nous donner tout au long de la lecture son avis sur tel ou tel dérèglement de la société. Un polar certes mais surtout un prétexte pour pointer la déliquescence de notre société. J’avoue que ces « apartés » tombent plus ou moins bien et m’ont dans l’ensemble mises mal à l’aise. La chasse fait appel à la traque, à la poursuite pour capturer, pour tuer. Bientôt on ne sait plus très bien qui est le chasseur et qui est la proie et c’est puissant, lorsque les rôles ont tendance à s’inverser. Une intrigue bien ficelée qui fait ressortir un personnage convaincu de faire le bien alors qu’il apparaît d’une violence et d’une froideur insoutenables. Une enquête dans l’air du temps qui reprend de nombreux faits divers et appuie sur le malaise des policiers face à « l’ensauvagement » de la société. On oscille ainsi constamment entre fiction et réalité et à ce petit jeu ce n’est pas toujours la fiction qui ressort gagnante. L’auteur se sert des ses personnages comme les porteurs des messages qu’il souhaite faire passer et qui il faut bien l’avouer ne sont pas des plus heureux, il nous dresse ainsi un portrait de la Police comme le dernier rempart contre les forces du mal. La ligne de temps du roman est importante car tout se joue sur une semaine Jour 1, etc. On sait donc déjà que tout sera résolu en 7 jours alors forcément, le rythme est rapide, ne chercher pas de temps mort, laissez vous prendre par l’intrigue et profitez. Bonne lecture.
Citations :
La forêt recouvrait les collines, la nuit recouvrait la forêt, la peur recouvrait ses pensées. Sa peur avait un son - celui de sa propre respiration terrorisée et de son cœur qui battait -, elle avait une odeur - celle de sa transpiration et de cette chose puante sur sa tête -, elle avait une couleur : noir, noir de la foret, noir de l'âme de ces hommes, noir de sa propre peau.
Aucun criminel ne fait montre de plus de cruauté que celui qui se croit d'avance absous de ces crimes par une cause qu'il pense juste
Époque de virus. Punitive, mortifère, purificatrice, qui avait trouvé son symbole :le masque. Posé comme un bâillon, comme le signe de reconnaissance d'une société muselée, hygiénisée, et aussi perdue et aux abois...