Le cabanon à l'étoile
Je remercie les Editions Calmann-Lévy pour l'envoi de ce nouveau titre
et des délicates attentions qui l'accompagnait.
Hélène Legrais
L’été est là. Au volant de sa Deudeuche, Estelle, artiste-peintre désargentée et bohème, part rejoindre son cabanon du Bourdigou, un de ces villages de vacances « sauvages » faits de cabanes bricolées qui fleurissent sur le littoral catalan en ce début des années 1960.
Elle prend en stop une toute jeune fille partie à l’aventure, qui dit s’appeler Cassiopée. Estelle n’est pas dupe mais elle lui offre son affection et le gîte dans sa paillotte.
D’une beauté ravageuse, la nouvelle venue ne tarde pas à provoquer des remous dans le village. Ses manières libres, sa sensualité ardente choquent, au point qu’Estelle doit plusieursfois prendre sa défense. Pourtant, la rage de vivre de sa protégée finit par l’effrayer.
Que fuit Cassiopée ? Pourquoi a-t-elle quitté les siens ? Sans rien brusquer, Estelle va percer à jour son bouleversant secret…
Chronique :
Dans les années soixante, il existait un endroit au bord de la côte catalane, encore sauvage et authentique. Il n’en fallait pas plus pour que les petites gens se l’approprient pour en faire leur paradis d’été. C’est ainsi qu’est né le Bourdigou, construit de bric et de broc, hautement symbolique puisqu’il a été rasé en avril 1979. C’est dans ce lieu mythique pour les catalans que se déroule le roman d’Hélène Legrais. Estelle, artiste peintre, la cinquantaine, issue de la bourgeoisie perpignanaise y vient tous les étés pour fuir la chaleur et vivre plus simplement au bord de la mer. Elle va croiser la route de la jeune Cassiopée, une belle jeune fille qui ne dévoile rien de son passé et croque la vie et les hommes à belles dents. Estelle l’accueille le temps d’un été dans son cabanon. Petit à petit entre les deux femmes va naître une amitié, une complicité qui amène la jeune rebelle à se livrer.
Perpignanaise d’adoption depuis plus de trente ans, je suis entrée avec délectation dans l’intrigue riche en émotion mais pas que, que nous propose l’autrice. J’ai eu le sentiment que l’histoire n’était finalement qu’un prétexte pour nous parler de sa région de cœur, la catalogne. Dans la première partie on apprend à faire connaissance avec les personnages, puis vient une seconde partie qui aurait pu ressembler à ce que l’on trouverait dans un guide touristique tant foisonne l’énumération du patrimoine régional, lieux et anecdotes historiques.
Pourtant grâce à son talent de conteuse, une écriture fluide et un style prolixe, on se laisse prendre à se tour d’horizon version catalane. De nombreuses expressions en catalan viennent donner tout son charme à ce récit qui pointe sur ce qu’était que le temps d’avant en contraste celui d’aujourd’hui. Une lecture simple qui fleure bon la nostalgie sans mélancolie, à découvrir. Bonne lecture.
Citations :
Cassiopée.
C’est ainsi qu’elle s’était nommée en jetant sur la banquette arrière sa valise cabossée avant de se laisser choir sur le siège défoncé qui laissait voir un de ses ressorts. Faussement désinvolte.
Certains flamants dormaient encore, la tête sous l’aile. D’autres, à peine réveillés, arpentaient paresseusement la lagune de leurs longues pattes compas. Le soleil levant teintait de rose l’eau étale de l’étang que pas la moindre vaguelette venait troubler et semblait colorer les plumes des gracieux échassiers. Un incarnadin léger qui débordait sur les collines de calcaire blanc des Corbières. Une délicate aquarelle tout en couleurs pastel qu’Estelle s’efforçait de reproduire sur son carnet de croquis, pinceau et boîte de couleurs à la main.