Chasse au trésor
Je remercie les Editions La Table Ronde
collection La petite vermillon pour cette nouvelle lecture.
Traduction : Cécile Arnaud
Molly Keane
Molly Keane (1904-1996) est née en Irlande dans une famille où « la chasse, la pêche et l’Église étaient d’importance, mais l’éducation confiée aux gouvernantes ». Entre 1928 et 1952, elle publia dix romans et des pièces de théâtre sous le nom de M. J. Farrell. Un pseudonyme qui s’imposait par souci des convenances à moins que ce ne fût pour se préserver de toute vengeance. Après un silence de trente ans, elle signe sous son vrai nom Good Behaviour (Les Saint-Charles), qui remporte un vif succès, puis trois autres romans. Elle s’éteint à l’âge de 90 ans, acclamée par la critique.
Finis le champagne, les journées aux courses, les escapades à Monte-Carlo... Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, les propriétaires de Ballyroden doivent changer drastiquement leur mode de vie. Le benjamin de la famille, sir Philip, décide de faire du château une maison d'hôtes. Il reçoit trois Londoniens fortunés, un frère, sa sœur et la ravissante fille de celle-ci, persuadés de jouir du calme luxueux de la campagne irlandaise. En découvrant des souris dans sa chambre décrépite, Dorothy comprend qu'elle a fait fausse route, mais sa fille et son frère insistent pour rester à Ballyroden : la première a succombé aux charmes de sir Philip, et le second ajoute foi aux délires de tante Anna Rose. Persuadée d'arpenter le monde en avion privé, cette vieille dame au passé mystérieux soutient que se trouve, dissimulée dans la maison, une coquette quantité de rubis...
Dans ce roman à mi-chemin entre la comédie de mœurs, le vaudeville et le théâtre policier à l'anglaise, Molly Keane, en grande satiriste, dresse une galerie de portraits tous plus échevelés les uns que les autres.
Un véritable petit bijou que cette chasse au trésor qui a pour point de départ les souvenirs d'une vieille dame excentrique. Pourtant, une poignée de rubis serait la solution au désastre financier qui menace Sir Phillip, sa famille et bien entendu le domaine de Ballyroden. Nous sommes dans la campagne irlandaise, à la fin de seconde guerre mondiale, devant les factures et les impayés qui s'accumulent, Sir Phillip décide d'ouvrir quelques chambres pour accueillir quelques hôtes payants. La rébellion des autres membres de la famille, gronde devant cette invasion qu'ils subissent comme une punition. Trois générations et les domestiques cohabitent. Les plus anciens ont eu une vie douce et aisée et ils sont incapables de comprendre qu'ils sont ruinés et se comporte comme des enfants alors que les plus jeunes font tout pour garder la tête hors de l'eau. Le renversement des rôles est tragi-comique.
J'aime beaucoup l'écriture de Molly Keane avec son côté précieux et désuet. Des dialogues rapides et des personnages attachants. Un mystère plane sur cette famille et se dévoile lentement, c'est sarcastique, drôle et surprenant. On a le sentiment d'un retour dans le passé, un peu comme si vous entriez à Downton Abbey mais en imaginant la propriété en ruine, sous la pluie, décrépite et humide. La vie à la campagne est parfaitement rendue, on voit l'importance de la nature, les fleurs, la chasse, la pèche dans leur mode de vie. Il y a un grand nombre de personnages avec lesquels nous devons faire connaissances et comprendre leur particularité, certains ne sont pas sans rappeler les personnages excentriques de En attendant Bojangles. Les personnages féminins sont superbes j'ai eu un coup de cœur pour certaines d'entre elles, leur caractère est riche et l'on comprend petit à petit ce qui se joue réellement dans cette famille. Bonne lecture.
Mon frère est un fervent collectionneur d'antiquités, dit Dorothy, dont le regard alla ostensiblement se poser sur les gens, pas sur les meubles.
- Madame Howard, avez-vous déjà entendu parler de banqueroute?
- Oui, bien sûr, qui n'en a pas entendu parler? C'est une façon d'arrêter de payer les factures.
Véronica croisa son regard, un regard tel qu'elle n'en avait jamais croisé, et se sentit consternée que son trouble fut si aisément mis à nu. Pourtant, par delà ce désarroi, elle éprouva un soulagement naissant à l'idée qu'on pût la comprendre ou s'intéresser à elle. Cela lui parut dangereux. C'était une idée neuve, et elle la fuyait, effrayée.